Aspects épidémiologiques   
Définitions   
Historiquement,   
on considère que le saignement     physiologique accompagnant un accouchement se situe entre 50     et 300 ml [11].   
Ainsi, la définition communément admise     de l’hémorragie du post-partum (HPP) est un saignement de     plus de 500 ml dans les 24 heures suivant la naissance, même     si cette définition reste discutée. En considérant cette     définition, les hémorragies du post-partum concernent environ 5 %     des grossesses [12, 13].   
Actuellement, la définition la plus communément admise     est clinique. Les obstétriciens font la distinction entre les     HPP simples répondant aux mesures obstétricales initiales, les     HPP sévères requérant la mise en route du sulprostone (Nalador®)     et les HPP graves nécessitant le recours à une technique     invasive d’hémostase [6].Si l’on considère les HPP engageant le pronostic vital, c’està- dire requérant un traitement radical immédiat (chirurgie ou embolisation d’hémostase), l’incidence est estimée à environ 1 pour 1 000 naissances [14].   
Une étude rétrospective récente, réalisée dans trois     régions françaises, montre que les soins prodigués en cas d’HPP     grave (> 1 500 ml de saignement estimé) étaient inappropriés     dans 38 % des cas [5]. Les facteurs associés à une     surmortalitématernelle étaient :   
• un nombre annuel d’accouchements dans le centre de     soins inférieur à 500 par an ;   
• l’absence de médecin anesthésiste-réanimateur de garde     sur place.   
Facteurs de risque d’hémorragie du post-partum   
La majorité des HPP surviennent chez des patientes     ne présentant aucun facteur de risque identifié     [6]. Actuellement, la valeur prédictive des facteurs de     risque d’HPP évoqués dans la littérature ne permet pas de     sélectionner les patientes devant faire l’objet de mesures préventives     spécifiques avant la naissance.Cependant, pour les patientes présentant un placenta recouvrant, une suspicion de placenta accreta ou des troubles sévères de l’hémostase,il     est recommandé (accord professionnel) d’organiser la naissance dans un centre     disposant d’un plateau médicotechnique adapté   
(soins intensifs maternels, produits sanguins labiles [PSL] disponibles sur place, gynécologueobstétricien et anesthésiste-réanimateur sur place 24 h/24) [6, 15].   
Étiologies   
Il existe plusieurs étiologies d’HPP, relevant chacune     d’une prise en charge obstétricale spécifique. Ces étiologies     peuvent être associées, rendant capital un diagnostic précis et     complet.   
Elles sont classiquement réparties en 
pathologies de la délivrance,
lésions de la filière génitale,
anomalies de l’insertion placentaire et
pathologies de l’hémostase [16].
pathologies de la délivrance,
lésions de la filière génitale,
anomalies de l’insertion placentaire et
pathologies de l’hémostase [16].
Pathologies de la délivrance, atonie utérine   
Le saignement peut débuter avant (hémorragie dite du     1er temps) ou après la délivrance complète ou partielle du     placenta (hémorragie dite du 2e temps). Rappelons que trois     conditions doivent être réunies pour interrompre le saignement     physiologique lié à l’accouchement :   
• le décollement et l’évacuation complète du placenta ;   
• la vacuité utérine ;   
• la rétraction utérine.   
Cette dernière est capitale pour clamper les vaisseaux     utérins qui ont perdu, en fin de grossesse, leur capacité à se     vasoconstricter.   
La rétraction utérine optimale n’est possible (en     dehors du cas particulier du placenta accreta) que lorsque la     vacuité utérine est acquise et complète.   
L’atonie utérine est présente dans 70 à 80 % des cas     d’HPP. Sa physiopathologie n’est pas totalement appréhendée.     Une prédisposition pourrait exister, certaines patientes récidivant     à chaque grossesse.   
Un mécanisme d’épuisement utérin ou de désensibilisation des récepteurs à l’ocytocine est fréquemment évoqué,   
ce qui fait critiquer par certains l’utilisation     importante d’ocytociques pendant le travail.   
Les facteurs favorisants semblent être :   
• la surdistension utérine (grossesse multiple,     hydramnios, macrosomie foetale) ;   
• un travail long ou au contraire trop rapide ;   
• une anomalie de la contractilité utérine (multiparité,     fibrome utérin, endométriose utérine, chorioamniotite,     malformation utérine) ;   
• et certains médicaments (salbutamol, dérivés nitrés,     anticalciques, halogénés), bien que les valeurs prédictives soient     très faibles [16].La rétention placentaire (même partielle ou ne concernant qu’une rétention de membranes) peut être la cause d’une atonie sévère, justifiant la réalisation systématique d’une révisionutérine en cas d’HPP débutante (cf. infra). Enfin, l’atonie peut entrer dans le cadre d’anomalies d’insertion placentaires que sont les placenta prævia et accreta [17].   
En cas d’accouchement à domicile, en l’absence de     saignement actif, la délivrance peut être différée à l’arrivée dans     le centre périnatal le plus proche.   
Cependant, une délivrance artificielle doit être effectuée dans les plus brefs délais en cas d’hémorragie précédant l’expulsion placentaire ; les équipes du Samu devraient être formées à la réalisation de ce geste simple et salvateur.   
Lésions de la filière génitale   
Elles sont constamment sous-estimées et très souvent     présentes en cas d’hémorragie après naissance par manoeuvres     instrumentales (forceps en particulier). Elles peuvent siéger à tous     les niveaux, de l’utérus au périnée. Elles peuvent concerner tous     les niveaux de la filière génitale depuis la rupture utérine     jusqu’au simple thrombus vaginal en passant par les déchirures du col     de l’utérus et les déchirures vaginales, vulvaires et     périnéales.   
La rupture utérine se voit surtout en cas d’accouchement     par voie basse sur utérus cicatriciel, surtout lié à une     précédente césarienne [18].   
L’analgésie péridurale a longtemps été     contreindiquée en cas d’utérus cicatriciel de peur de masquer     les signes de rupture. Ce n’est plus le cas, l’utérus cicatriciel     en étant même devenu une bonne indication, du fait du     risque élevé de passage au bloc opératoire. L’hémorragie n’étant     pas toujours extériorisée, même en post-partum, la rupture     utérine doit être recherchée en cas d’instabilité hémodynamique     non expliquée par les pertes objectivées.   
Les déchirures du col de l’utérus peuvent survenir     lors d’efforts expulsifs ou de forceps sur un col     incomplètement dilaté.   
Les déchirures vaginales, vulvaires et périnéales sont     générées par les forceps ou la tête du bébé. Elles doivent être     suturées rapidement [19].   
Le thrombus vaginal, ou hématome paravaginal, est     également d’origine traumatique. Souvent non extériorisé lorsque     la muqueuse vaginale est intacte, il constitue une     hémorragie interne pouvant être massive, fusant en rétropéritonéal un     peu comme dans les traumatismes graves du bassin. Les     signes révélateurs peuvent être une douleur intense à la levée de     la péridurale (hématome sous tension), un hématome des     grandes lèvres, une hypotension, voire un état d’agitation non     expliqué.   
Anomalies de l’insertion placentaire :     placenta prævia, placenta accreta   
Le placenta prævia :   
il s’agit d’une insertion anormalement basse du placenta sur le segment inférieur de l’utérus.Dans certains     cas, il recouvre le col (placenta prævia recouvrant) et empêche tout accouchement     par voie basse.Il peut être à l’origine d’un saignement prépartum, à l’occasion d’un décollement placentaire spontané ou associé à des contractions, mais aussi en post-partum où il peut être à l’origine d’une hémorragie par atonie utérine, le segment inférieur de l’utérus ayant de faibles capacités contractiles [20].   
Le placenta accreta :il se définit comme une adhérence anormale du placenta au myomètre.   
 Il est la conséquence d’un défaut d’implantation et de décidualisation (transformation des cellules du stroma endométrial en cellules déciduales) de la caduque basale.   
L’absence localisée ou diffuse de cette     caduque basale s’interposant habituellement entre les villosités     choriales et le myomètre caractérise le placenta     accreta.   
On distingue différents types selon les degrés d’infiltration     du placenta dans le myomètre :   
• placenta accreta : adhésion anormale des villosités     choriales au myomètre sans l’envahir ;   
• placenta increta : invasion profonde des villosités     choriales dans le myomètre jusqu’à la séreuse sans la dépasser     ;   
• placenta percreta : invasion des villosités choriales dans     tout le myomètre franchissant la séreuse et pouvant envahir     des organes de voisinage tels que la vessie ou le tube digestif     [17].   
Toute tentative de clivage forcé entre placenta et     myomètre en cas de placenta accreta provoque le plus souvent     une hémorragie massive lors de la délivrance mettant en jeu     le pronostic vital maternel.   
L’incidence du placenta accreta ne cesse d’augmenter     ces dernières années avec un taux variant de 1/500 à 1/2 500     selon les séries, augmentation apparemment corrélée à     l’augmentation croissante du taux de césariennes.   
Tous les phénomènes susceptibles d’endommager     la muqueuse utérine sont considérés comme facteurs de risque     de placenta accreta, en particulier les cicatrices secondaires à     une chirurgie utérine (césarienne, myomectomie, traitement     chirurgical d’une perforation ou d’une malformation utérine),     les cicatrices secondaires à des gestes endo-utérins     (curetage).   
Le diagnostic de placenta accreta est évoqué le plus     souvent au moment de la délivrance devant l’absence de plan de     clivage du placenta lors d’une délivrance artificielle et/ou dans     un contexte d’hémorragie de la délivrance. Il est confirmé     par l’examen anatomopathologique du placenta et/ou de la     pièce opératoire en cas de chirurgie.   
Idéalement, le diagnostic est évoqué en anténatal grâce     aux techniques d’imagerie que sont essentiellement     l’échographie couplée au mode Doppler, voire à l’imagerie par     résonance magnétique (IRM). Le diagnostic précoce permet alors d’orienter la     patiente vers un centre expérimenté où une discussion pluridisciplinaire permet de     définir la meilleure stratégie obstétricale.   
Les modalités de prise en charge ne sont pas à ce     jour clairement codifiées et opposent deux attitudes thérapeutiques     :   
• l’attitude extirpative : une tentative de délivrance forcée     est effectuée. Cette attitude engendre dans la plupart des cas     une hémorragie immédiate et massive, et le recours à     l’hystérectomie d’hémostase est alors souvent la seule solution.     Cette chirurgie peut être délabrante en cas de placenta     percreta, pouvant nécessiter des résections digestives et/ou une     cystectomie partielle secondaires à l’envahissement     placentaire.   
L’hystérectomie d’hémostase compromet par ailleurs     définitivement la fertilité ultérieure chez la     patiente.   
La Figure 2 est une photographie de pièce anatomique d’hystérectomie montrant l’envahissement de la paroi de l’utérus par le placenta percreta ;   
• l’attitude conservatrice :   
la prise en charge conservatrice des placenta accreta consistant à laisser le placenta en place au moment de la délivrance a été décrite par l’équipe obstétricale de la maternité Port-Royal à Paris. Les résultats des études déjà réalisées semblent prometteurs. Sur une série de 30 patientes, l’équipe de la maternité de Port-Royal rapporte seulement quatre hystérectomies liées aux résidus placentaires.Dans tous les autres cas, le placenta a spontanément involué, sans que la physiopathologie de ce processus d’involution soit clairement comprise. Outre la préservation de l’utérus, cette prise en charge présente avant tout l’intérêt de diminuer les besoins transfusionnels [21, 22].   
Troubles constitutionnels ou acquis de l’hémostase   
Les troubles constitutionnels peuvent concerner     l’hémostase primaire (thrombopénie, thrombopathies,     thrombasthénie, maladie de von Willebrand) ou l’hémostase secondaire     (déficits en facteurs) et indiquer des thérapeutiques     spécifiques.Les troubles acquis peuvent essentiellement être médicamenteux (héparinothérapie préventive ou curative pendant la grossesse) ou liés à une pathologie obstétricale.   
Certaines situations, comme la rétention de foetus mort, l’hématome rétroplacentaire, la prééclampsie, le syndrome HELLP (Haemolysis Elevated Liver enzyme Low Patelet count), l’embolie amniotique, peuvent générer de véritables fibrinolyses aiguës ou coagulations intravasculaires disséminées (CIVD) [23] (cf. infra). Enfin, toute hémorragie grave du post-partum peut se compliquer d’une coagulopathie secondaire, mélange de dilution et d’activation. Il faut se souvenir que les troubles de l’hémostase sont bien plus fréquemment la conséquence de la spoliation sanguine liée à l’hémorragie que l’étiologie du syndrome hémorragique. Ainsi lors d’une hémorragie obstétricale, la présence de troubles de l’hémostase doit plutôt être considérée comme un facteur de gravité associé et ne doit pas empêcher la recherche d’une autre étiologie primaire de cette hémorragie.
Prise en charge initiale d’une hémorragie du post-partum   
Les objectifs de cette prise en charge sont résumés sous     forme de schéma dans la Figure 4 [28].   
Prise en charge multidisciplinaire immédiate   
Tous les intervenants potentiels doivent être prévenus     sans délai (obstétriciens, anesthésistes-réanimateurs,     sages-femmes, infirmières).La rapidité et l’adaptation de la prise en charge à l’importance de l’hémorragie sont deux éléments primordiaux : il est conseillé d’effectuer un relevé spécifique des pertes sanguines quantitatives ainsi qu’un relevé chronologique (accord professionnel).   
Les gestes doivent être réalisés par un personnel formé.     En milieu universitaire, les médecins et sages-femmes en     formation ont toute leur place, mais doivent être encadrés par un     senior.Pour les plus petites maternités, il faut alors envisager l’appel     de renforts (astreinte interne à l’établissement ou Samu),     l’approvisionnement en PSL en grande quantité et     l’évacuation éventuelle de la patiente vers une structure plus     lourde.   
Identifier la cause du saignement   
Les plus fréquentes sont l’atonie utérine,   
la rétention placentaire et les plaies cervicovaginales. Les gestes obstétricaux à réaliser immédiatement consistent à s’assurer de la vacuité utérine (accord professionnel) :   
• réaliser une délivrance artificielle si la délivrance n’a pas     eu lieu ;   
• réaliser une révision utérine systématique même si la     délivrance semble complète ;   
• assurer un massage de l’utérus s’il est hypotonique,     vessie vide.   
La réalisation prolongée de gestes endo-utérins est associée     à l’administration d’une antibioprophylaxie à large spectre     (grade C).   
Examen de la filière génitale sous valves   
Il doit être systématique en cas d’HPP après naissance     par voie basse, surtout en cas de manoeuvre d’extraction.     L’examen de la filière doit être exhaustif, et réalisé dans des     conditions techniques optimales : une aide et une analgésie adaptée     sont souvent nécessaires. Les plaies de la filière ou du col     peuvent être à l’origine de pertes sanguines importantes et rapides.     Les sutures chirurgicales nécessaires doivent être effectuées le     plus rapidement possible.   
Administration d’utérotoniques de façon systématique   
L’ocytocine est préconisée de première intention en cas     de survenue d’une HPP : 5 à 10 UI en intraveineuse lente (grade     C) suivis d’une perfusion d’entretien : 5 à 10 UI/h     pendant 2 heures.   
Les prostaglandines ne sont pas recommandées en     première intention dans le traitement de l’HPP (accord     professionnel).   
En cas d’aggravation de l’hémorragie du post-partum (Fig. 5)   
Il est nécessaire de recourir aux étapes suivantes du     traitement si l’hémorragie persiste au-delà de 15 à 30 minutes     (c’est dire l’importance d’un relevé chronologique). Ce délai est     à moduler en fonction de l’abondance de l’hémorragie et de     la tolérance hémodynamique [29].   
Réanimation   
Après la transmission des informations par l’équipe     médicalisée du Samu,   
la réanimation symptomatique est menée parallèlement à l’évaluation multidisciplinaire (gynécologueobstétricien, radiologue interventionnel) [30]. Sur le plan symptomatique, notre attitude est la suivante.   
Si l’état hémodynamique de la patiente est stable, la     patiente est évaluée et surveillée en salle de « déchocage » sur le     plan obstétrical et hémodynamique.   
Les médecins anesthésistes-réanimateurs complètent     le monitorage hémodynamique de la patiente par la mise en     place de cathéters veineux central et artériel, idéalement en     fémoral gauche. Il est fortement déconseillé de tenter d’accéder     aux veines jugulaires en raison de l’hypovolémie et des troubles     de l’hémostase. Il est préférable d’utiliser les vaisseaux     fémoraux gauches pour permettre au radiologue interventionnel     d’accéder aux vaisseaux fémoraux droits.   
Le bilan paraclinique est large et systématique,   
à la recherche de complications fréquentes.   
Il comprend en particulier un bilan biologique extensif, un dosage de la troponine I et un électrocardiogramme (ECG) à la recherche d’une ischémie myocardique et une radiographie du thorax.   
Dès que possible (en pratique pendant la mise en place     d’un cathéter fémoral gauche), le médecin     gynécologue-obstétricien débute une échographie abdominopelvienne, même en     cas d’accouchement par voie basse, à la recherche d’un     hémopéritoine et/ou d’une rétention placentaire (visualisation ou non     de la ligne de vacuité utérine). Il pratique ensuite (quand     les cathéters sont en place) une révision utérine et un examen     du col même s’ils ont été réalisés avant le transfert. En effet,     les lésions de la filière génitale sont souvent sous-estimées.     Leur suture par voie basse peut s’avérer inefficace en raison     d’une coagulopathie sévère et/ou d’un oedème important des     tissus.   
Dans les cas les plus simples,où le saignement semble contrôlé et où aucun geste hémostatique n’est indiqué, la surveillance clinique et biologique est poursuivie en salle de réveil ou en réanimation.   
Lorsque le saignement est toujours actif (objectivé par     un saignement extériorisé, une aggravation des troubles     de l’hémostase, un mauvais rendement transfusionnel, une     instabilité hémodynamique persistante), une embolisation     artérielle est réalisée en première intention, en particulier en cas     d’accouchement par voie basse et d’atonie utérine. Elle est le     plus souvent efficace d’emblée [31, 32].   
En cas d’hémopéritoine important compliquant une     césarienne, une laparotomie est discutée pour réaliser le bilan et     la réparation des lésions (rupture utérine, trait de refend).     Une embolisation préopératoire nous a plusieurs fois semblé     utile mais l’évaluation d’une telle stratégie est     difficile.   
Traitement pharmacologique de l’atonie utérine   
L’atonie utérine peut survenir d’emblée et être la cause     de l’HPP ou venir compliquer secondairement une     hémorragie d’une autre étiologie, en particulier une lésion de la     filière génitale initialement négligée. Elle est quasi constante dans     les formes graves. Les différents traitements pharmacologiques     de l’atonie ne se conçoivent qu’associés aux gestes     obstétricaux destinés à assurer la vacuité et l’intégrité utérine ainsi que     la réparation d’éventuelles déchirures     cervicovaginales.   
Ocytocine (Syntocinon®)   
L’ocytocine est un peptide naturel de neuf acides     aminés synthétisé à partir d’un précurseur hypothalamique     puis transporté et stocké dans la post-hypophyse.   
Elle est libérée dans la circulation à partir de stimuli en provenance du col utérin, du vagin et des mamelons, et augmente la fréquence et la force des contractions utérines en agissant sur des récepteurs spécifiques, dont le nombre augmente en fin de grossesse. Le Syntocinon® est un analogue de synthèse de l’ocytocine, disponible sous forme d’ampoules de 5 UI qui doivent être conservées à 4 °C. L’administration de 5 à 10 UI en intraveineuse lente suivie d’une perfusion continue en raison d’une demi-vie courte (15 min) est systématique, lors de tout accouchement, après la délivrance du placenta, car le taux plasmatique spontané d’ocytocine est très variable d’une patiente à l’autre. Il est déconseillé de dépasser 60 à 80 UI j–1 en raison du risque d’hyponatrémie. Cependant, l’injection lente de faibles doses n’a aucun effet [33].   
L’ocytocine est un puissant vasodilatateur qui peut     être source d’hypotension artérielle si la volémie est     insuffisante et/ou en cas d’injection intraveineuse     rapide.   
L’injection sur voie périphérique est la règle. Les     bolus peuvent provoquer des douleurs transitoires au point     de perfusion.   
Sulprostone (Nalador®)   
Les prostaglandines sont de puissants     utérotoniques,synergiques de l’ocytocine.   
Synthétisées par la cyclo-oxygénase à     partir de l’acide arachidonique,   
elles sont produites dans de nombreux organes et ont une activité apocrine.   
Les utérotoniques sont les prostaglandines E2 et F2 (PGE2 et PGF2).   
Elles jouent un rôle important dans la contraction utérine et sont synthétisées en excès en fin de grossesse, participant au déclenchement du travail [34].   
Le sulprostone, analogue de synthèse de la PGE2, est     devenu le traitement de référence de l’atonie utérine résistant     à l’ocytocine [35]. Il doit être administré précocement, si     possible dans les 30 premières minutes [12]. Une première     ampoule (500 μg) est administrée en 1 heure par une seringue     électrique, tout en poursuivant le massage utérin.   
L’effet doit apparaître très rapidement, au bout de quelques minutes d’administration.En cas d’efficacité, le relais est pris par une ampoule en 4 à 6 heures à la seringue électrique parfois suivie d’une ampoule en 12 heures. En cas d’échec, d’autres thérapeutiques décrites plus loin doivent être envisagées. L’arrêt du sulprostone, dont la demi-vie est de 8 à 12 minutes, doit avoir lieu en     salle de travail, en salle de réveil ou en réanimation afin d’effectuer     un relais par de l’ocytocine et vérifier l’absence de récidive. Sur     le plan hémodynamique, la PGE2 est vasodilatatrice [36, 37].     Elle déclenche fréquemment une hyperthermie pouvant poser     de réels problèmes diagnostiques avec un sepsis [38].   
Certaines observations ont cependant fait état de réponses   
hémodynamiques paradoxales,   
à type d’hypertension artérielle sévère     avec vasoconstriction, imposant la prudence chez les     patientes toxémiques [39].   
 Les injections intraveineuses directes rapides et intramurales sont déconseillées [12] : plusieurs cas d’infarctus avec spasme coronaire, voire d’arrêt circulatoire attribués au Nalador® ont été publiés [40, 41].Ces observations posent le problème de l’utilisation de ce     puissant utérotonique chez les patientes présentant des facteurs de risques     vasculaires ou quand la perfusion coronaire est menacée     [42].   
 Dans notre expérience,   
 nous avons observé plusieurs cas d’ischémies myocardiques aiguës sévères avec retentissement hémodynamique et/ou troubles du rythme, ce qui justifie la réalisation d’un ECG 12 dérivations à l’admission puis tous les jours ainsi que la surveillance régulière de la troponine I pendant toute la phase aiguë. L’étude des dossiers de 55 patientes consécutives, admises sur 18 mois avec des critères de choc hémorragique, a retrouvé une élévation de la troponine I dans plus de 50 % des cas. Ce mouvement enzymatique était associé à des signes électriques d’ischémie. L’analyse multivariée ne retrouve pas le sulprostone comme facteur indépendant. En revanche, la pression artérielle diastolique inférieure à 50 mmHg et la fréquence cardiaque au-dessus de 110 b min–1, deux paramètres de la balance d’oxygénation myocardique, sont des facteurs prédictifs. Une patiente présentant une pression artérielle diastolique endessous de 50 mmHg et une fréquence cardiaque supérieure à 110 min–1 a une troponine I élevée dans 78 % des cas [32].   
Néanmoins,la description, dans la littérature, d’épisodes cliniques et électriques d’ischémie myocardique, lors d’administration de Nalador®, en dehors de toute instabilité hémodynamique (pour interruption de grossesse ou mort foetale in utero) incite à rester vigilant [43].   
En cas d’arrêt circulatoire, quelle qu’en soit la cause (spasme, anémie ou hypovolémie) survenant sous sulprostone, l’adrénaline, coronarodilatateur, reste le médicament vasopresseur de choix. Enfin, l’asthme n’est pas une contre-indication à son utilisation dans le cadre d’une HPP, le sulprostone étant intrinsèquement bronchodilatateur [44].   
Prostaglandine E1 (misoprostol, Cytotec®)   
Elle est proposée en intrarectal (3 à 5 comprimés) dans     le traitement de l’atonie utérine [45]. Le misoprostol a un     certain nombre d’avantages théoriques par rapport au     sulprostone.Tout d’abord, les effets secondaires cardiovasculaires du Nalador® et du Méthergin® n’ont pas été rapportés avec ce produit.De plus, son     administration en intrarectal est simple, sans recours à une perfusion continue.     Cependant, la variabilité des résultats publiés et une pharmacocinétique moins     prévisible par cette voie lui font préférer le sulprostone [46, 47]. Enfin, pour     certains, l’administration de misoprostol, en faisant retarder     l’introduction du sulprostone est une perte de temps et de chance.     Son utilisation n’est donc pas préconisée par la     recommandation pour la pratique clinique (RPC) française     [6].   
Maléate de méthylergométrine (Méthergin®)   
C’est un dérivé de l’ergot de seigle. Vasoconstricteur,   
la gravité de ses effets secondaires (nécrose myocardique) et son mode d’administration peu maniable ont conduit à son abandon.   
 

